I. Introduction
Depuis son accession à l’indépendance, le Mali fait face à des rebellions cycliques menées par des groupes irrédentistes dans le Nord du pays, qui ont occasionné de grandes pertes en vies humaines, des dégâts matériels considérables et une détérioration du climat social entre les communautés.
Devant cette situation conflictuelle, une série d’accords ont été signés dont celui de Tamanrasset du 6 janvier 1991, le Pacte National du 11 avril 1992, et l’Accord d’Alger du 4 juillet 2006.
Au regard de la crise multidimensionnelle et des troubles sociaux graves sans précédent, engendrés par les évènements de 2012, et face à un risque d’embrasement de la sous-région, la communauté internationale s’est engagée avec le gouvernement du Mali dans la recherche d’une solution durable, à travers la conclusion d’un nouvel accord.
Cette démarche a conduit le gouvernement du Mali et les groupes armés, sous l’égide de la Communauté Internationale avec comme chef de file l’Algérie, à conclure l’Accord pour la Paix et la Réconciliation nationale issu du processus d’Alger, signé le 15 Mai 2015 et parachevé le 20 Juin 2015 à Bamako.
Ledit Accord s’articule autour de quatre (04) piliers ; à savoir:
les questions politiques et institutionnelles
- les questions de défense et de sécurité
- les questions de développement socio-économique et culturel
- les questions de réconciliation, justice et question humanitaire
L’Accord pour la Paix et la Réconciliation nationale issu du processus d’Alger, comprend Un (1) Préambule, Sept (7) Titres, Vingt (20) Chapitres, Soixante-Huit (68) Articles, ainsi que Trois (3) Annexes et Autres documents connexes.
II. Contexte
L’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger, demeure la pierre angulaire du processus de paix au Mali et une composante centrale des efforts de stabilisation dans la sous-région.
Certes, des avancées substantielles ont été réalisées dans le cadre de la mise en œuvre dudit Accord, notamment dans ses aspects Défense et Sécurité. Des retards ont été, toutefois, constatés dans l’exécution de certaines actions prioritaires, qui s’expliquent en partie par l’instabilité politico-sécuritaire du pays, la pandémie de la COVID 19, et le manque d’attributions requises pour véritablement négocier et prendre des engagements par certains représentants des Parties aux sessions des Organes de mise en œuvre de l’Accord, particulièrement au niveau des Sous-Comités du CSA et de la CTS.
Pour sa part, le Gouvernement de Transition, mis en place suite au coup d’État du 18 août 2020, a donné une place privilégiée à la mise en œuvre de l’Accord en se fixant quatre axes d’actions prioritaires visant la relance du processus de paix ; à savoir : 1) redynamisation du processus DDR ; 2) accélération des réformes politiques et institutionnelles ; 3) soutien aux actions de développement, et ; 4) relance du chantier de la réconciliation nationale.
Par ailleurs, la consécration de l’Accord dans les textes de référence de la Transition, la participation des Mouvements signataires au processus de mise en place des organes de la Transition, et la nomination de représentants des mouvements signataires au sein du gouvernement, ont été hautement appréciés par les Parties à l’Accord et par la Communauté internationale.
III. Atouts
Les principaux atouts de l’APR sont, notamment :
- la fin de la belligérance entre les FAMa et les Mouvements signataires de l’Accord ;
- l’Accord constitue un véritable instrument de réformes dans les domaines de Défense et de Sécurité (RSS), de Politiques et institutionnels (Constitution ; Décentralisation/régionalisation ; Réorganisation territoriale, etc…), de Développement économique social et culturel ; et, en matière de Réconciliation, de justice et d’humanitaire (CVJR, Loi d’entente nationale, Cadis et autorités traditionnelles, Lutte contre l’impunité, Plan d’urgence pour Personnes déplacées internes et réfugiés, etc) ;
- la crise multidimensionnelle offre l’opportunité de refondation du pays : « Malikura » ;
- la disponibilité et l’accompagnement de la Communauté internationale au Mali.
IV. Défis
Les difficultés et les défis à la mise en œuvre intégrale de l’Accord se résument, principalement, en ce qui suit :
- le déficit d’appropriation de l’Accord ;
- l’insécurité grandissante dans le Nord et le Centre du pays ;
- le manque de confiance entre plusieurs Parties à l’Accord (GDM, MSA et Inclusivité) ;
- les conflits de leadership au sein de certains Mouvements signataires de l’APR ;
- le manque d’arbitrage par le Comité de Suivi de l’Accord (CSA) concernant les situations de divergences et de différends entre les Parties à l’Accord ;
- la faible mobilisation des ressources des PTF pour faire face aux engagements souscrits dans l’Accord, en dépit des annonces faites le 22 octobre 2015 à Paris (environ 3,2 Mrds d’euros) ;
- les faiblesses du dispositif institutionnel de mise en œuvre et de suivi de l’Accord, en termes d’impulsion, de coordination et de recherche de synergie.
V. Perspectives
Les efforts déployés par le Gouvernement de Transition pour diligenter la mise en œuvre intégrale de l’Accord visent, ce qui suit :
- Clôturer, dans un délai raisonnablement court, les actions prioritaires prévues par les quatre (4) volets de l’Accord, y compris celles relatives à l’opérationnalisation des nouvelles entités administratives ; au parachèvement du processus du DDR accéléré et son extension à l’objectif de 3000 ex-combattants ; au retour de l’Administration et des services sociaux de base dans le Nord et le Centre du pays ; au lancement des premiers projets pilotes dans le cadre du Fond du Développement Durable ; et à la reprise des auditions publiques de la Commission Vérité Justice et Réconciliation (CVJR) ;
- Se projeter sur le restant du processus de mise en œuvre de l’Accord en adéquation avec les objectifs et le calendrier de la Transition, notamment, l’exécution des aspects Défense et Sécurité de la Feuille de route actualisée du 18 Décembre 2020.
Pour ce faire, les Parties signataires de l’Accord devraient mettre en œuvre des actions concertées, claires et cohérentes, de faire preuve d’une attitude constructive et pragmatique. La confiance mutuelle a besoin d’être soigneusement entretenue.